Eau et maladies à vecteurs par Didier FONTENILLE (2023)

AUTEUR : Didier FONTENILLE est directeur de recherche émérite, IRD (Institut de Recherche pour le Développement)
RESUME :
Il existe des centaines d’arthropodes vecteurs d’agents infectieux aux vertébrés, dont l’homme. Ce sont par exemples les tiques, les moustiques, les puces, les punaises triatomes, les phlébotomes, les Culicoïdes, les mouches tsé-tsé, les simulies, les poux. Comme organismes vivants tous sont dépendants de l’eau disponible pour leur équilibre physiologique, et en ce sens les changements climatiques (température, humidité relative, ressources en eau) ont un impact sur leur distribution, abondance et comportement.
Certains d’entre eux, comme les moustiques, vecteurs de virus comme la dengue, et de parasites comme les Plasmodium du paludisme, ou les simulies vectrices de nématodes parasites, ont une phase juvénile aquatique. Ces insectes à métamorphose complète font leur développement larvaire dans l’eau, la plupart du temps en quelques jours.
Il existe près de 3700 espèces de moustiques connues sur terre et presque autant de type de gîtes aquatiques de développement larvaire, petits ou grands, contenant des eaux pures ou polluées, douces ou saumâtres, chaudes ou froides.
Certains ne sont dépendants que des pluies et du régime des pluies comme des Aedes vecteurs du virus de la fièvre de la vallée du Rift dans les grandes mares temporaires en Afrique. D’autres se développent sur le bord de rivières permanentes, comme des anophèles responsables de paludisme, ou dans des mangroves où ils supportent des salinités importantes. D’autres sont inféodés aux zones inondables, où ils pondent leurs œufs qui résistent à sec plusieurs semaines, tel Aedes caspius, parfois extrêmement abondants après les mises en eau de terres en Camargue. D’autres se développent dans les phytotelmes (urnes de plantes carnivores, creux d’arbre).
Certains enfin profitent des collections d’eau créées, volontairement ou non, par les humains, en ville en particulier. C’est le cas du moustique tigre (Aedes albopictus) vecteur des virus de la dengue, Zika, chikungunya, ou du moustique commun (Culex pipiens) vecteur des virus West Nile et Usutu, en expansion en Europe. On trouve des larves de ces vecteurs dans des collections d’eau aussi variées que des soucoupes sous des pots de fleurs, des bidons ou pneus abandonnés, des récupérateurs d’eau de pluie, des avaloirs d’eau pluviale, des fontaines, des fossés ou flaques de bords de routes, des vides sanitaires inondés. La lutte contre ces moustiques doit prendre en compte cette diversité de niches écologiques, et adapter ses stratégies afin d’être efficace et efficiente, avec des impacts les plus faibles possible sur les autres composantes de l’environnement.