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L'Hydre
création musicale de
Patricia Capdevielle, voix
André-Marc Delcourt, flûte contrebasse
texte : Heiner Müller (extrait de "Ciment" - 1971)
(editions de Minuit - traduit de l'allemand par Jean-Pierre Morel)
(Écouter sur un système audio de qualité ou au casque - haut-parleur du smartphone insuffisant)
Notre civilisation se trouve confrontée à la violence qu'elle génère, contre elle même, contre les populations humaines, les individus, les femmes, les autres races, les plus faibles, mais aussi contre les animaux et le monde vivant dans son ensemble, et contre ce petit morceau d'espace qui nous a fait naître, nous héberge, nous nourrit et nous fait respirer, tandis qu'il poursuit sa course folle autour du soleil. Cette violence semble s'accroitre au fur et à mesure que nous nous disons « civilisés », elle se tapit également sous de multiples formes au fond de chacun d'entre nous.
Heiner Müller (9 janvier 1929 - 30 décembre 1995) est un dramaturge, directeur de théâtre, poète d'Allemagne de l'Est. « Héraclès 2 ou l’Hydre » apparaît dans « Ciment», pièce écrite en 1971. Comme souvent, la référence à un mythe ancien ouvre de nombreux niveaux de lecture et de compréhension .
Heiner Müller détourne le mythe d’Héraclès en évoquant le second de ses travaux: le récit conte l'épopée d'un homme dans une forêt, parti à la bataille contre l'Hydre de Lerne, monstre qui se recompose et ressuscite lui même au fur et à mesure qu'on le détruit... Alors même que l'on pense suivre une piste, celle du cheminement vers un combat, Müller enchaîne avec précision des mouvements très divers qui brouillent consciencieusement les perceptions du héros. Les repères du temps, de l'espace et de l'identité même du sujet se délitent dans une écriture dense et organique. Le parcours est guidé par les sensations d'un personnage en route, en déroute, sur des routes.
Peu à peu il réalise que la forêt, le monstre et lui-même ne font qu'un!
Confronté à sa propre part de monstruosité, l'Homme serait ainsi son unique et seul ennemi, créant les propres conditions de sa perte et/ou de sa renaissance. Les immenses doutes qui traversent notre époque, à l'échelle de l'humanité, (et comment reconstruire, se reconstruire après chaque destruction) se retrouvent dans le parcours individuel de chacun d'entre nous et dans ce combat intime que nous menons contre notre propre part d'ombre pour nous chercher nous mêmes. Comme Sisyphe, l'Héraclès/Hydre de Heiner Müller est condamné à un travail qui ne connaîtra pas de fin, « inutile et sans espoir » : se combattre, se mutiler, s'autodétruire, puis se recomposer sans cesse, souvent « de travers », au cœur de la forêt (lui même), des membres « haches / couteaux / tentacules » de son propre corps, le combat continue... « Le temps du monde fini commence. »
La musique se construit autour du texte, avec et contre lui, le musicien, (flûtes et flûte contrebasse), se profile comme un arbre agité par les désordres du souffle humain
hamadryademth....