Laurence Boulay & Robert Veyron-Lacroix (harpsichord, spinet) Le clavecin et son histoire

[@HarpsichordVinylGallery]

Sleeve notes by Laurence Boulay and Robert Veyron-Lacroix 1/2 Adapter à chaque instrument une oeuvre, ou un groupe d'oeuvres qui appartienne à son pays d'origine et à l'époque de sa construction ; choisir parmi les pages retenues celles qui convenaient le mieux à l'instrument en fonction de ses qualités propres ... QU de ses défauts: voici quel fut notre dessein en composant le programme de ce disque. Si le choix s'avéra assez facile pour les clavecins modernes, pour le Baffo et pour le Hemsch, quelques instruments nous posèrent des problèmes. Fallait-il toujours limiter le choix des oeuvres au seul pays d'origine pour les deux Rückets et l'épinette Menegoni ? Ou ne pouvaiton élargir un peu le ehamp des écoles musieales, et offrir une plus grande diversité d'oeuvres à l'auditeur? Si cette dernière solution nous parut plus séduisante, nous ne l'avons finalement retenue que parce qu'elle nous semblait mieux illustrer une vérité historique. Ne trouvaiton pas des instruments signés par Rückers en France comme en Angleterre, autant que dans les Pays-Bas? Les clavecins voyageaient beaucoup et servaient des musiques différentes. Ainsi, pourquoi ne pas profiter de ce courant d'échanges si largement usité au 17' siècle pour confier à l'épinette Rückers des pièces de virginalistes anglais, à l'ottavina des pages italiennes et françaises, au clavecin Rückers des oeuvres françaises et germaniques ? Cela nous permit d~ composer un programme varié, puisant à presque toutes les écoles, et offrant un panorama - si condensé et si incomplet soit-il - de la musique de clavecin de la fin du 16e siècle jusq:u'à nos jours. Le départ entre les oeuvres destinées à l'orgue et celles qui s'adressaient au clavecin n'était pas nettement marqué à la fin du 16e siècle. Une seule littérature s'adaptait aux deux instruments. Les « Canzoni d'Intavolatura d'organo » de Claudio Merule (1533-16041) s'adressent à l'orgue comme au clavecin. La « Canzon a 4, dita la Rolanda », publiée à Venise en 1692 - exactement contemporaine du clavecin Baffo qui la transmet - convient admirablement, par son style simple ct clair, à l'instrument à cordes pincées. Dans les premières années du 17e siècle, le clavecin ou l'épinette se désolidarisent de l'orgue et acquièrent un répertoire propre, sous l'impulsion d'artistes de talent. Frescobaldi en Italie, le groupe des virginalistes en Angleterre, Sweelinck aux P"ays-Bas puis Froberger en Allemagne ct les clavecinistes français, fondèrent les pre- mières écoles révélant une tendance, obéissant à une esthétique différente. Car on . ne parle pas en Italie, en Angle- tetre, en Allemagne et en France la même langue musi- , cale : le clavecin bénéficiera l'un des premiers - et avant les instruments à archet - de la diversité des styles. Quel lien .existe entre la toccata de Frescobadi ct les pages des virginalistes qui lui ,sont contemporaines? Peuton concevoir un langage et un esprit plt\S opposés ? Si la fantaisie est présente iei comme là, l'oeuvre italienne est une vaste improvisation où règne une grande souplesse de mesure, alors que dans ' les pages anglaises, pour la plupart fort concises, brille un esprit primesautier soutenu par une rythmique dansante. Extraite du 1" 'livre de « Toccate e partite d'intav,olatura di cembalo » publié entre 1614 et 11127, l'teuvre de Frescobaldi cobaldi est d'une grande somptuosité sonore. Harmonies riches, traits rapides concourent à créer une « mus.que dc rêve, d'une inégalable variété de figuration rythmiques, par lesquelles le clavecin perd toute la sécheresse qu'on pourrait lui reprocher et acquiert une souplesse, unc poésic qui en font l'instrument des confidences» (N. Dufourcq). S'échelonnant sur une trentaine d'années, les pièces anglaise, s .furent écrites pour le virginal, c'est-à-dire pour unc eplDeUe de tyPe rectangulaire, sans registres. La « Courante française» de W. Byrd (1543-1623) au langage modal, appartient enco're à la renaissance. Les oeuvres de Giles Farnaby (1565-1640) et John Bull (v. 1562- 1628), comme celles de William Byrd, sont issues de la danse (le mot « toye » signifiant « jouet, divertissement », explique le caractère enjoué de ces pièces). Mais la musique descriptive est également présente : « the Fall of the Leave » (la chute des feuilles) de Martin Pecson (v. 1572-1650) est une page d'un impressionisme délicat et expressif, La fraîcheur harmonique et rythmique de toutes ces oeuvrcs est très caractéristique de cette période de la musique anglaise.

[@Renshen1957]

Thank you for the incredible range from one of the oldest if not the oldest, to the 20th century plucking pianos of Pleyel and Neupert vs the historically informed work of Hubbard. The comparison makes for a great education.

[@HarpsichordVinylGallery]

Yes, it should be part of the education in every primary school ; -)

[@HarpsichordVinylGallery]

I guess the best documented harpsichord recording ever released, so it could not be missed in the gallery.

[@_PROCLUS]

The spinet sounds totally enchanting in the hands of the wonderful Laurence Boulay ... The selection is marvelous ... Thank you for the great upload, as always ...

[@HarpsichordVinylGallery]

Great project in France thanks to the Erato-label, the conservatory of Paris and not in the least the players. Those initiatives should be done more often.

[@beasheerhan4482]

I thank you for all your wonderful work, Dear HVG! Until now I have not found the time to sit and listen to this album all the way through, but, today is the day - and what a pleasure it is. I am not surprised that this was Daniel's favourite, as there is an embarassment of riches here. The epinette (at 20:18) is quite magical - like a keyboard mandolin, though, with the ability to play bass. The placement of the epinette in this recording is fantastic, too - it acting like a raspberry sherbert between the two heavier courses of Ruckers and Hemsch! Of course, the whole album is wonderful. These performances are splendid , too - each wrought in a way that is exceedingly sensitive to the relationship between the music and the instruments. Last, I would like to thank you for having taken the time to film all the aspects of the album, and, as well, your opening it and examining it. Over and beyond the recording, itself, it reminds me what I so love about the process of LPs - their size, the information they can contain, and, the fact that, in some way, early music LPs are like the reading of a great novel. God bless you and happy new year, Sir!

[@HarpsichordVinylGallery]

Yes with such a lay-out of the vinyl recording, it would have been a crime to ignore the abundant and effective documentation of all the tracks. Trying to give the feeling of having the LP in your hands while listening to the music. In most cases the graphical design of the covers and the well organized backside with texts and photos to explain the context of the tracks is part of the art. That's why I called the label of the channel 'Harpsichord Vinyl Gallery' to emphasize that it is not only the music without any context but the whole package is an object of art. For Daniël it is a sort of disappointment now he has found this record of his youth three times in a row in a short period of time. First of all the music gets mythical proportions over the years as long as you can't find it. And secondly he always had one goal while browsing vinyl in second hand shops and markets which goal has been reached now he found his holy grail of his youth. Since he gave me one of his doublures, I did an experiment with him. We have some listening sessions of new acquisitions of harpsichord cds now and then. From the digitalized vinyl I made a cd and put it in my cd-player pretending it was a new cd. Since he is very good in guessing the right composers, even instruments and players I started at the Louis Couperin and let him listen to the music. Of course he could determine it was a non-mesured prelude by Couperin, but than? Next composer Rameau ... still no clue than J.S. Bach and than he surrendered. Of course the context was missing and expectations were totally different tuned. That he really is good in guessing I can illustrate that when I put on the new cd by Bob van Asperen which existence he did not know, he said immediately that the toucher sounded so familiar that he thought it was an imitation of the style by Bob van Asperen!

[@beasheerhan4482]

@@HarpsichordVinylGallery ... Thank you, Sir, for you voluminous and thoughtful reply! Happy New Year!

[@HarpsichordVinylGallery]

@@beasheerhan4482 Best wishes for 2020. You were not the only one who was shocked by the tempo of the Allemande by d'Anglebert!

[@beasheerhan4482]

@@@HarpsichordVinylGallery Glad to hear that, Sir, though I cannot say that I am surprised:)

[@TheGloryofMusic]

Thanks for the detailed presentation.

[@HarpsichordVinylGallery]

One hour was hardly enough to present all the fine documentation included in this wonderful vinyl.

[@aenadanziger6252]

Happy holiday! Thank you very much for uploading this

[@HarpsichordVinylGallery]

Thanks. A vinyl hand picked to help you in the cold wintertime ;-)

[@KuFF]

Si beau, si puissant, le clavecin possède une prestence incroyable et inégalable. Merci pour ces uploads qui donnent le sourire quand ils arrivent dans mes abonnements.

[@HarpsichordVinylGallery]

Those French people really knew how to present a recording with a great concept to leave a lasting impression.

[@paulgrad5183]

Man, those big harpsichords sure make a Ruckers.

[@HarpsichordVinylGallery]

Sleeve notes by Laurence Boulay and Robert Veyron-Lacroix 2/2 L'école française du 17" siècle est marquée par trois grands noms : J. Champion de Chambonnières et ses disciples J.H. d'Anglebert et Louis Couperin (v. 1626-1661). L'oncle de François Couperin confie au clavecin des mouvements de danse et d'admirables préludes non mesurés où une grande liberté est laissée à l'interprète pour « recréer» l'oeuvre à la manière d'une improvisation qui coulerait de ses doigts : ces préludes ne sont-ils pas notés uniquement à l'aide de rondes reliées par de grandes courbes? Le « Tombeau de M. de Blancrocher » est un hommage rendu au célèbre luthiste dont la mort accidentelle, en 1658, i,nspira plusieurs « tombeaux ». Alors que Louis Couperin oppose une méditation douloureuse aux cloches d'un carillon, Johann Jakob Froberger écrit une splendide déploration au caractère improvisé. Cet organiste et c'ompositeur allemand (1616-1667) élève de Frescobaldi à Rome, fit un séjour à Paris 'en 1652 au cours duquel il rencontra les plus grands musiciens de l'époque. Sans doute connut-il lors de ce voyage le luthiste Blancrocher qui devait mourir cette même année. On sait que Ber,nardo Pasquini (1637-1710) fut un compositcur d'une renommée européenne et que son enseignement lui attira de nombreux élèves italiens (D. Scarlatti) et étrangers (Kerll, Krieger, Muffat). Les voyages qu'il fit , il V;enne et à Paris (il joua du clavecin devant Louis XIV) lui valurent des hommages flatteurs. Il unit , dans ses oeuvres pour clavecin, une spontanéité vive et beaucoup de charme. Le franç a is Jean-François Dandrieu (1682-1738) appartient à une autre génération, obéit à une autre esthétique. Pasquini est un homme du 17' siècle, et ses oeuvres, malgré leur grâce, revêtent parfois une certaine sévérité. Tout au contraire, Dandrieu, bien qu'organiste de Saint-Merry et dê la chapelle royale, écrivit un grand nombre de pièces d'un caractère aimable, sans pour autant q,ue la sensibilité dont elles portent la marque soit mièvre. Sa musique de clavecin paraît faire la synthèse entre l'admiration u'il p orte à Fr. Couperin et celle que lui inspirent Lulli et Corelli. La « Gémissante », extraite de la 2de suite de son 1" Livre publié en 1724 est un rondeau le retour régulier d'un motif et d'une rythmique soulignent le caractère plaintif de la pièce. Si le « Carillon de Cithère » est l'une des pages les plus connues de , François Couperin (1668-1733), ses pièces à deux: clavecins sont fort peu jouées. Il en existe cinq. Une partIcularité reunit quatre d'entre elles : la partie de main gauche est idenlique pour les deux instruments. Dans « la Létiville » comme dans la « Muséte de Taverni » les deux mains » droites des clavecinistes (désigneef par les termes « sujet» et « contre-partie») dialoguent constamment sur une basse commune. Bien que Jean-Philippe Rameau (1683-1764) fut beaucoup plus jeune que Fr. Couperin, ses premières pièces pour clavecin parurent avant celles de son aîné. C'est en 1706 qu'il publia son premier livre, alors qu'il fallut que Couperin attendit 1713 afin de pouvoir donner au public un volume qui circulait depuis de longues années en manuscrits. Les premières oeuvres du jeune Rameau témoignent de ses connaissances musicales, mais sont déjà marquees par une forte personnalité. Le splendide prélude mi-improvIsé, mi-mesuré est encore dans la tradition des oeuvres de Louis Couperin et d'Anglebert ; les audaces harmonIques dont Rameau fait preuve ne sont pas sans accentuer cette appartenance. Si les Sarabandes sont simples d'harmonie comme d'expression, la Gavotte est déjà caracterIstIque du style ramiste. Que dire du Prélude et fugue en mi bémol mineur de Jean Sébastien Bach (1685-1750), sinon qu'i! est l'un des plus beaux de tout le « Clavecin bien tempéré» ? Beau par la profondeur, l'intériorité qui s'en dégage. Un immense chant au caractère méditatif d'une splendide envolée - à mi-chemin entre le lied et le récitatif - soutenu 'par des accords puissants, sert de prélude à une' fugue à trois voix construite sur un thème dc plain-chant (De Profundis, déjà exploité par Frescobaldi), où Bach utilise avec une facilité déconcertante toutes les possibilités toutes les ,combinaisons les plus savantes de l'art contrap{mtique. Il emane de ce portique à la grandeur de cathédrale une atmosphère de recueillement intense 'oeuvre d'architecte de poète, de croyant. Le c!avecin ayant été détrôné par le pianoforte puis par le piano au 19' slecle, les compositeurs n'écriverent plus que pour ce dernier. C'est grâce à Wanda Landowska que l'instrument aux cordes grattées retrouva peu à peu la faveur des mélomanes au 20' siècle. C'est sur sa demande, en effet, que Manuel de Falla en 1926 et Francis Poulenc en 1927 composèrent les deux premiers concertos contemporains pour clavecin. Depuis, les oeuvres les plus diverses lui sont a .nouveau confiées. Deux conceptions très differentes exIstent cependant chez nos compositeurs. L'une est de « pasticher» plus ou moins la musique ancienne d'en ,retrouver l'atmosphère ; la seconde est d'employer les possibilités sonores de l'instrument par tous les moyens. dont nous disposons aujourd'hui, de l'incorporer aux gouts actuels. C'est dans cet esprit que Maurice Ohana, pour un clavecin Pleyel, écrivit les « Carillons pour les heures du jour et de la nuit ». Laurence BOULAY et Robert VEYRON-LACROIX.